Sur Internet, on regarde en streaming, on télécharge, on pirate en toute illégalité. C’est devenu la norme, même dans la vraie vie. Et c’est clairement du vol. Quelle place doit-on donner à ces digressions ? Seraient-ce les conséquences inévitables d’une société du tout-marchand ou simplement la finalité de nos avancées technologiques ?
Qui a volé l’orange du marchand ?
En septembre dernier, le concept store de running Distance lance une opération qui fait parler aux côtés de BETC : Et si on laissait nos clients voler dans notre magasin ?
Ne courez pas tout de suite en direction de Paris, cette idée tenait à une condition : semer le vigile. Et seulement 2 sur plus de 70 personnes ont réussis. En même temps, c’est drôlement moins facile lorsqu’il s’agit de Méba-Mickaël Zézé, l’un des meilleurs sprinters du 100m en France.
Si ce coup de maître en a séduit plus d’un, et surtout les deux qui sont repartis avec leur paire, on en doute pas. D’autres ont soulevé le caractère dangereux de l’incitation au délit.
Parce que, oui, rappelons le. Selon l’article 311 du Code Pénal, le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui, et est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
Pourtant, ça fait déjà quelque temps que le vol a atteint son point de normalisation.
Le poids de l’inflation se ressent, et particulièrement sur l’alimentaire. Et même si les marques discount ont la côte, ça ne suffit pas. Selon les relevés d’UFC-Que choisir, se nourrir aujourd’hui coûte 25% plus cher aux consommateurs qu’en janvier 2022.
Pour y remédier, le vol est devenu le nouvel eldorado de monsieur et madame-tout-le-monde. Sur RMC, ils affirment : "J'économise 30 à 40€ par semaine". Et pour plus de discrétion, exit le caddie.
Sur Twitter, certaines personnes le revendiquent fièrement, à la seule condition de privilégier les grands supermarchés aux petites boutiques. L’idée, c’est de pouvoir manger à sa faim, tout en effectuant une action engagée contre le capitalisme.
Aux dernières nouvelles, on pouvait même lire un thread sur Twitter “Mes meilleures techniques pour voler discrètement au supermarché”.
En bref, c’est devenu tout un art, une philosophie de vie voire même un combat pour les personnes en situation de précarité.
La nouvelle devise : “Si vous voyez quelqu’un voler dans un supermarché, non, vous n’avez rien vu.”
La matière grise ou l’or du siècle
Inutile de prétendre être choqué, la bouche béante. Le vol, ça ne date pas d’hier. Et pour les derniers survivants de la génération DVD, ce spot de la Federation Against Copyright Theft le dit bien :
On est désolés pour ceux qu’elle a pu traumatiser, mais voilà : le vol, c’est n’est pas que glisser un oignon dans sa poche pour la soupe du soir. C’est aussi s’octroyer la propriété intellectuelle de quelqu’un.
Et oui, la grande pochette de CD vierges gravés avec supplément marqueur noir était bel et bien illégale. Parce que télécharger gratuitement des musiques protégées sans respecter le droit de l’auteur, c’est comme photocopier toutes les pages d’un livre pour ne pas avoir à l’acheter.
Et, en quelques sortes, oui ça le tue. Puisque ça ne fait qu’accentuer la précarité des auteurs.
C’est d’ailleurs ce que près d’une vingtaine d’entre eux reprochent à OpenAI, le créateur de ChatGPT. George R.R. Martin, Jodi Picoult, John Grisham et bien d’autres ont peur pour leur travail, notamment quand il est utilisé sans leur consentement. Parce qu’en utilisant leurs écrits pour entraîner son algorithme, ils accusent OpenAI de mettre en place un « vol systémique à grande échelle ».
Et ils sont loin d’être les seuls. Les plaintes se succèdent alors contre les IA pour “violation de la propriété intellectuelle”.
Et l’argent n’est encore que la partie immergée de l’iceberg. Rien ne nous appartient plus, même pas notre image.
C’est la faute à l’IA
Voler l’image de quelqu’un est une chose. La modifier en est une autre. C’est là que la place des intelligence artificielles est évidente dans l’accélération de ce paradigme. Vous savez, les fameux deepfakes ?
Parce que là où on ne pouvait pas croire tout ce qu’on lisait. Saint-Thomas jugerait vrai tout ce qu’il voit désormais.
Et c’est ainsi qu’Emmanuel Macron se retrouve en manifestation. Sans oublier le Pape François en doudoune oversized. Au-delà du potentiel memesque de ces visuels, il faut surtout se rappeler qu’ils maquillent la réalité. Et que, pendant qu’on rigole devant Jean-Marie Bigard sur Balance ton quoi, certains y croient.
On assiste donc à la naissance d’un outil de désinformation. Et il s’avère d’autant plus dangereux lorsqu’il touche à la politique.
L’interprétation de chacun en est donc lourdement impactée : Est-on condamnés à interroger tout ce que l’on voit désormais ? Face à cela, quelle place donner à l’IA ?
Certes, s’assurer de la pertinence de nos informations n’est pas une nouveauté. Or, si l’IA n’a pas inventé la fake news, elle lui déroule un beau tapis rouge. Elle affiche une infinité de possibilités qui risquent de réellement brouiller les pistes de la vérité.
Finirait-on par s’engager dans une société de l’hypervigilance ?
Heureusement, le fact-checking fait déjà une part de ce travail, même si on n’est jamais à l’abri d’une erreur. Après tout, même les journalistes sont humains.
Alors, on pourrait être tenté de faire porter le chapeau à l’IA, mais ce qu’on oublie, c’est que sans nous, rien de tout ça n'aurait existé. Ce n’est pas la technologie qui est à jeter, c’est notre façon de l’utiliser.
Alors maintenant qu’on s’est bien marré, on pourrait plutôt opter pour la transparence ?
Nous stalker