Summertime sadness
Ça fait quelques années déjà qu’il est porté disparu. Le hit de l’été s’est envolé avec nos jeunes années, et on commence à s’inquiéter. Pour rappel, avant la pluie par intermittence et les nuits à 45 degrés, l’été c’était ça :
Et si personne ne s’affaire à perpétuer la tradition, que restera-t-il des dernières années ? Les années 1980 en sont les preuves. S’il y a une chose qui perdure dans le temps, c’est bien la musique. Ne croyez pas que vos petits-enfants feront encore des dabs dans quarante ans. À la limite en 2023, on avait le film de l’été. Mais en 2024, silence radio. La seule chose à laquelle on a eu le droit, c’est un teasing pour Shrek 5… qui sortira d’ici 2026. Autant vous dire qu’on a peu d’espoir pour l’été 2025. À une certaine époque, l’artiste qui accédait au titre de hit en tirait pourtant une bien grande fierté. Quant à nous, on se découvrait des talents de chorégraphe sur Gangnam Style et un accent espagnol sur Despacito.
Naturellement, la nostalgie nous frappe. Notre très chère Lana Del Rey avait vu juste en 2012. La summertime sadness est bien là. Et c’est peut-être à cause des artistes qui n’en font plus qu’à leur tête.
La recette du hit de l’été
Avant d’accuser qui que ce soit, il serait peut-être utile de se mettre au clair sur ce concept. Comment ça se fabrique un hit de l’été ? On s’en doute bien, si c’était simple, tout le monde en ferait. On aurait du fun à la pelle toute l’année. Mais si elles ont toutes eu le pouvoir de nous faire ressentir cette même euphorie chaque été, c’est bien qu’elles ont quelques points en commun. Déjà en 2019, Squeezie, Joyca, Kezah et Freddy Gladieux tentaient de percer le mystère dans une vidéo Youtube.
Alors, si on résume :
- Il faut que ce soit hyper joyeux et que ça respire le monoï d’après Kezah
- Il faut que ça soit ensoleillé, voire même qu’on bronze des oreilles à son écoute selon Freddy
- Il faut un petit air Latino, d’après Squeezie
- Et laisser une vraie place à la voix selon Joyca
Et c’est ainsi qu’on se retrouve à connaître par cœur un mashup qu’on a jamais entendu de notre vie. Or, qu’on se le dise : cette recette reste encore bien vague. Si vous étiez déjà en train d’enregistrer vos meilleures toplines parfum Monoï, il vous faudra encore quelques secrets pour créer un son qui fait se sentir les pieds dans le sable de Cancún.
Alors qu’elle profite de ce manque d’ambiance, Lorie Pester tente de surfer sur une vague de nostalgie pour rassembler ceux qui tapissaient leur chambre de ses posters. Dans un EP souvenir, plusieurs artistes contemporains reprennent ses tubes de l’époque. Et face à son propre succès, elle le dit bien : dans la création d’un hit, il y a aussi une notion de hasard. Peut-être n’a-t-on plus le temps de le rencontrer en 2024 ?
On va vite, on s’entraîne
En réalité, il y a peu de chance que l’on ai déjà fait le tour de toutes les combinaisons musicales gagnantes possibles. Notre sensibilité a peut-être simplement changé.
Dans mon quartier ça chante : « tout le monde emmerde Bardella ».
Je crois que j’aime bien ce nouveau hit de l’été. — Pipou 🦌 (@pipoupipouM) July 7, 2024
Comme si on avait perdu le goût de le légèreté, nos chorégraphies insouciantes se voient remplacées par des TikTok entraînant sur des sujets de société. Peut-être parce que ces derniers alourdissent l’air ambiant, et qu’on n’a plus la tête à s’amuser. Ou peut-être parce qu’on a justement envie de s’en amuser. Et si les tubes à l’ancienne pouvaient durer tout l’été, on peut désormais appeler ça une hyperbole. Au mieux, ils tournent pendant une semaine. Au pire, on les a déjà oubliées. Parce que les tendances n’ont plus la même durée de vie. Dans le milieu de la mode comme dans la musique, l’éphémère prime. On est moins dans le contrôle, plus dans l’instantané et l’interactivité ; et ça peut aller bien loin parfois. La dernière trend musicale en date ? Glucksmann en version country.
Tiré d’une interview datant de juin, cette simple phrase est devenue le nouveau terrain de jeu sur TikTok. Et elle n’a clairement pas pour objectif premier la diffusion d’idées politiques. En version country, mexicaine, et même house, les remix des utilisateurs participent à créer le tube du moment. Et cette fois, chacun à l’opportunité de le décliner et d’interagir avec la tendance pour la voir prendre encore plus d’ampleur. C’est, en quelque sorte, un running gag qui risque de finir à la radio. La naissance des tendances s’inverse, une fois de plus.
Et si c’est ça qu’il restera des années 2020, on suppose que c’est déjà pas si mal ? Une dose de sarcasme rythmée vaut toujours mieux qu’une chanson de Keen’V en boucle.
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